4e dimanche de Pâques : le Bon Pasteur
Le pape Léon XIV a été élu le jeudi qui précède le dimanche du Bon pasteur. Le pape François, lui, est mort le lendemain de Pâques. Ses derniers mots publics ont été la bénédiction urbi et orbi, une bénédiction à la fois particulière et universelle qui fait rayonner la lumière du Christ ressuscité. Les premiers mots de Léon XIV sont de la même lumière : « Que la paix soit avec vous tous ». C’est la salutation du Christ ressuscité à ses apôtres au soir de Pâques. Ces mots, Léon XIV les a adressés à la foule en liesse sur la place Saint Pierre – comme je vous ai les ai adressés au début de cette célébration – et, largement, à « tous les peuples, à la terre entière ».
Il a ainsi commenté : « Tel est le premier salut du Christ ressuscité, le Bon Pasteur qui a donné sa vie pour le troupeau de Dieu. » L’Église est le troupeau de Dieu. Son seul Pasteur, c’est le Christ mort et ressuscité. En une image étonnante, le livre de l’Apocalypse, il y a un instant, nous a mis devant les yeux l’Agneau immolé-debout qui est notre pasteur pour nous conduire « aux sources des eaux de la vie. »
Qu’est-ce qu’un pasteur ? Il est défini par ce qu’il fait : garder, nourrir, protéger, soigner, conduire. Garder le troupeau, ne pas le disperser, tâche d’unification. Nourrir du pain de la vie éternelle. Protéger contre les dangers, la puissance de la Mort, les attaques du Diviseur, attaque extérieures et intérieures. Soigner par l’huile et le vin, par la parole qui calme, réconforte, fait grandir. Conduire vers la rencontre avec le Père.
Pasteur unique, le Christ n’utilise pas d’autre pouvoir que sa douceur. Il ne hausse pas la voix. Sa voix est douce et humble comme son cœur. L’Évangile est tout entier dans ce portrait.
L’Évangile, pas le pape, pas notre évêque, pas votre curé. Il y a un seul pasteur et un seul Évangile. Il est remis à chacun, à vous comme à moi. Pas chacun dans son coin, chacun avec les autres, ensemble, unifiés, protégés, soignés, conduits par l’unique Pasteur, l’unique Agneau-berger qui a donné sa vie.
Néanmoins, pour que le troupeau avance ensemble – en « synodalité » terme du pape François repris par le pape Léon XIV – l’unique Pasteur a délégué. De l’intérieur du troupeau, il a appelé des serviteurs, des ministres ordonnés, évêques, diacres et prêtres, et des ministres institués, de la Parole, de l’Eucharistie, catéchistes. Si nous en appelons certains « pasteurs » c’est que leur mission est d’unifier le troupeau, de distribuer la nourriture donnée par l’Agneau, de soigner et conduire à la vérité du Christ. Que soit connue, enseignée, célébrée la vérité du Christ dans l’Église ! Que le troupeau de Dieu, l’Église, s’élargisse de ceux et celles qui, en dehors d’elle, ont besoin de lumière ! L’humanité a besoin de l’Agneau-berger et de son Église pour être rejointe par Dieu et par son amour.
Pour les ministres ordonnés et institués, enseigner la doctrine est important. Pour chaque chrétien, vivre sa foi est important. Ce n’est pas l’essentiel. Je rappelle un mot de Robert Francis cardinal Prévost : « Nous sommes souvent préoccupés par l’enseignement de la doctrine, la manière de vivre notre foi, mais nous risquons d’oublier que notre première mission est d’enseigner ce que signifie connaître Jésus-Christ et de témoigner de notre proximité avec le Seigneur. La première chose à faire est de communiquer la beauté de la foi, la beauté et la joie de connaître Jésus. »
La première chose à faire est de communiquer la beauté de la foi, la beauté et la joie de connaître Jésus. La première chose ! (Gérard Billon)
3e dimanche de Pâques. Présence invisible…
« Jésus se tenait là, ils ne savaient pas que c’était lui… » Expérience banale. Expérience chrétienne. Si nous savions que le Ressuscité se tient là au bord de nos rivages, près de la porte de notre chambre, de nos bureaux, au fond d’un atelier, dans le couloir d’un supermarché… Si nous le savions, que ferions-nous ?
Tout doucement, après Pâques, la vie quotidienne reprend ses droits, bonnes ou mauvaises habitudes : « si on allait pêcher… », « si on allait se promener », « si on allait voir un tel », « si je me mettais au jardin ». Travail, détente, moments en famille, entre amis… Et voilà que quelque chose de neuf, d’inattendu arrive : un ami qui meurt, un enfant qui s’annonce, un emploi décroché, une visite impromptue, une remarque qui nous a comblés de joie, ou au contraire un échec… Qui pense que ça vient de Dieu ? Le croyant, celui qui sait que Jésus est proche (il y en a qui sont aimés et qui ne le savent pas), le disciple qui a assez de foi pour traverser la Passion avec le Christ, à ses côtés.
D’où 3 questions :
Où se tient Jésus pour produire de la vie ? Réponse : au cœur du quotidien – Sacrement(s), Bible, rassemblement Église, frère ou sœur dans la détresse, cosmos, nature. Caché dans le paysage, derrière les effets de sa grâce, de sa beauté, de ses besoins…
Comment le reconnaître ? En étant sensible – clairvoyant – à ce quotidien qu’il m’est donné de vivre. Car je suis persuadé que quelque part, il se tient là et qu’il oriente mes activités.
Comment devenir clairvoyant ? Par l’habitude de le fréquenter dans sa Passion, le don qu’il a fait de lui-même, don qui est le cœur de nos célébrations eucharistiques.
Clairvoyant… malgré ou avec notre péché. Sur le rivage du quotidien il y a un petit feu. À quoi le clairvoyant disciple que Jésus aimait reconnaît-il Jésus ? A sa parole étonnante qui demande d’explorer le quotidien (« Jetez donc le filet… »). Oui, mais aussi à ce petit feu qui en rappelle un autre, le feu de braise qui brûlait dans la cour du grand prêtre au moment de la trahison.
Il nous faut écouter les paroles étonnantes proclamées par l’Église et qui ramènent au quotidien. Il nous faut voir aussi le feu de braise à la fois rappel de la trahison et signe du pardon. À la suite de Simon-Pierre, nous sommes parfois des traîtres repentis, joyeux de voir que malgré cette identité, nous avons surabondance de grâce. (Gérard Billon)
Homélie du 2e dimanche de Pâques
Un jour un artiste japonais qui avait créé un très beau vase, le voit tomber et briser. Alors dans un mouvement d’amour pour son œuvre, il souligne chacun des morceaux d’un mince filet d’or, et de l’échec, il fait une œuvre plus belle encore. Il s’est passé le même mouvement dans la résurrection de Jésus. Mais, mais si la beauté du vase aux filets d’or “saute aux yeux”, il n’en est pas de même de la résurrection de Jésus ! Nous allons voir ensemble que pour voir la stupéfiante beauté de la résurrection de Jésus il nous faut d’abord comprendre la “leçon de Thomas”, puis ensuite voir que la résurrection transforme radicalement nos vies.
Comprendre la “leçon de Thomas” : “Alors que les disciples avaient verrouillé les portes, Jésus vint et il était là au milieu d’eux”. Ses disciples voient ses mains et sont côté, ils sont remplis de joie. Alors Jésus leur donne son amour : “recevez l’Esprit Saint” et cherche les “mettre en mouvements”. “De même que le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie”. Mais rien ne se passe, 8 jours plus tard ils seront toujours enfermés. La résurrection les a réjouis, mais elle reste pour eux un évènement extérieur, leur cœur sont verrouillés par la peur. Il en est très différemment de Thomas : Il y a une “espérance” dans son exigence de “voir” et de “toucher”, il veut être certain qu’il s’agit bien de Celui qu’il connaissait, c’est avec Lui qu’il veut renouer le fil de leur histoire. Alors lorsque Jésus vient et montre ses propres blessures, tout à coup Thomas “voit”, il voit “les filets d’or tissés sur ses plaies par l’amour de Dieu, il voit avec son cœur et laisse jaillir un magnifique cri de foi “Mon Seigneur et mon Dieu”, c’est un cri d’amour, c’est une relation profonde et intime qui se noue. La leçon de Thomas c’est que pour voir la beauté de la résurrection il faut qu’il y ait une espérance humaine que la grâce de Dieu puisse féconder. Il faut une ouverture, une blessure dans le cœur de l’homme pour que l’amour de Dieu puisse l’atteindre. Et alors, la résurrection de Jésus devient une récréation nos propres vies. Jésus répandit sur eux son souffle. Ce mot souffle est le même que celui utilisé lorsque Dieu a insufflé l’haleine de vie à Adam. Jésus ressuscité fait des disciples, comme de chacun de nous des créatures nouvelles, en insufflant l’Esprit Saint, en insufflant l’Amour comme principe de Vie. Il nous ouvre à la Vie, à la Vie éternelle avec Dieu. C’est pourquoi “De même que le Père nous a envoyé, moi aussi je vous envoie”. Chacun de nous, baptisés, nous sommes morts et ressuscités avec Jésus, alors nous sommes envoyés pour être les témoins de son Amour. Et pour cela il nous donne un pouvoir : celui de remettre ou de maintenir les péchés ! Le péchè qui est à la racine de tous les autres péchés, c’est de ne pas croire à l’amour de Dieu, remettre les péchés, être maintenu dans son péché, c’est être maintenu dans l’ignorance de l’amour de Dieu, d’où évidemment l’urgence de répondre à notre envoie par Jésus.
Nous pouvons dire avec Jésus : “Heureux ceux qui croiront sans avoir vu”, car même ceux qui ont vus, devront ouvrir leur cœur à l’amour de Dieu. La résurrection de Jésus est un acte d’amour qui concerne chacun de nous, il nous ouvre l’horizon insoupçonné de la Vie éternelle, de la Vie avec Dieu. (Henri Miailhe, diacre)